Arctic : la pomme OGM américaine qui ne brunit plus !

OGM : voilà les pommes qui ne brunissent pas !

Une entreprise canadienne commercialise dès novembre 2017 aux États-Unis une variété génétiquement modifiée de pomme, qui ne s’oxydera pas.

à gauche : la pomme classique brunit après découpe ; à droite : la pomme « Arctic » reste claire !

OGM : voilà les pommes qui ne brunissent pas

Jusqu’à présent aux États-Unis, pays phare des OGM, on achetait surtout du soja ou du maïs génétiquement modifiés. Côté fruits, seule la papaye d’Haïti modifiée pour résister à un virus était sur le marché. Une tomate génétiquement modifiée a été commercialisée entre 1994 et 1996, mais s’est révélée être un échec commercial. Dorénavant, les Américains vont aussi pouvoir croquer des pommes OGM. 

Une entreprise canadienne commercialise dès novembre 2017 aux États-Unis une variété génétiquement modifiée de pomme, qui ne s’oxydera pas après découpe.

S’il vous a déjà pris l’idée de préparer une salade de fruits à l’avance en y mettant des pommes coupées en dés, vous avez dû le regretter au vu du résultat esthétiquement calamiteux que vous avez constaté en la servant : la chair des fruits avait viré au marronnasse, comme si elle avait rouillé. Même chose s’il vous est arrivé de croquer dans une pomme et de la laisser quelques minutes pour faire autre chose. En revenant à votre fruit, vous avez constaté qu’aux endroits mordus des marques couleur caramel étaient apparues.

Pour comprendre ce qui se produit, un petit détour par la biochimie est nécessaire. Lorsque la pomme est meurtrie, que ce soit par un choc, par la lame du couteau ou par vos dents, les parois des cellules endommagées se brisent, ce qui libère les composés phénoliques contenus à l’intérieur. Dans la cellule se trouve également une enzyme, la polyphénoloxydase (PPO). Un troisième élément intervient : l’oxygène de l’air. A son contact, et avec l’aide de la PPO, les composés phénoliques s’oxydent et se transforment… en pigments, d’où la couleur brune obtenue. Les chimistes ont d’ailleurs nommé la réaction « brunissement enzymatique ». Pour l’empêcher ou la ralentir, plusieurs parades sont connues. Pour la salade de fruits, on conseille ainsi le jus de citron (l’acide ascorbique qu’il contient ayant des propriétés antioxydantes) et la conservation au réfrigérateur, qui ralentit le processus. Pour les préparations plus industrielles de fruits coupés, d’autres solutions existent : le stockage sous azote, qui élimine l’oxygène, ou l’ajout de conservateurs.

Et il y a désormais la réponse OGM, qui consiste à empêcher le brunissement en supprimant un de ses acteurs. Une solution aussi simple que radicale. Comme il serait stupide d’enlever les composés phénoliques – car, non contents de protéger le fruit des attaques des ravageurs, ces composés lui confèrent arôme et goût –, les chercheurs d’OSF ont pris la PPO pour cible. Même si le génome complet de la pomme n’a été publié qu’en 2010, les scientifiques connaissaient depuis plusieurs années les quatre gènes responsables de la production de cette enzyme. OSF a choisi non pas de retirer ces gènes mais de les réduire au silence en les empêchant de s’exprimer.

Il peut sembler disproportionné de créer un organisme génétiquement modifié pour des raisons d’esthétique, mais OSF a mis au point un argumentaire bien rodé, en deux points, pour justifier la mise sur le marché de ses pommes OGM. Un aspect économique d’abord, car des fruits qui ne brunissent pas après un choc n’ont plus ces marques qui empêchent leur commercialisation et envoient des tonnes de fruits au rebut. Et un aspect diététique ensuite avec la fin de l’effet « beurk » dû à la décoloration des pommes, effet qui détournerait des fruits nombre de consommateurs, notamment les plus jeunes.

Cette oxydation joue pourtant un rôle intéressant pour la pomme, puisqu’elle permet naturellement au fruit de déployer son système de défense face aux agressions bactériennes ou aux champignons.
C’est OSF qui a répondu en expliquant deux choses : primo qu’aucun affaiblissement des défenses végétales n’avait été noté sur les essais effectués depuis des années et secundo que, si la PPO joue bien un rôle défensif chez la tomate, ce n’est pas le cas pour la pomme. Dans ce fruit, l’enzyme ne serait qu’un fossile, l’héritage « inutile » d’un lointain ancêtre végétal !

Rappelons que ce brunissement enzymatique est la réaction biochimique qui donne sa belle couleur dorée au cidre ou au jus de pommes.